Renouveler les signes dans l’espace urbain

Signaletique dans la ville de Hong Kong

Une journée sans Helvetica. C’est le pari fou tenté par le graphiste américain Cyrus Highsmith. Et force est de constater que la chose n’est pas aisée : étiquettes de vêtements, métro, Internet, cartes de crédit… La police de caractères suisse est partout ! Le journaliste Simon Garfield va même jusqu’à la comparer avec l’oxygène : « dans les rues de la planète, ces caractères sont comme de l’oxygène. Vous n’avez pas le choix, vous devez les respirer ».

Au-delà de l’anecdote, cela nous révèle que nos villes sont uniformisées. Que l’on soit à Venise, New York ou Hong Kong, peu importe, nous faisons face aux mêmes signes, aux mêmes publicités, aux mêmes types de signalétique, quitte à se sentir parfois agressé, écrasé sous leur poids. Et si on cherchait à réinventer ces signes pour proposer une autre vision de notre espace urbain ? C’est ce qu’ont souhaité faire Charlotte Eckstein et Siya Wang, étudiantes en deuxième année de cycle master Ville Durable à L’École de design Nantes Atlantique, pour leurs projets de fin d’études respectifs. Retours sur leurs propositions.

Signaletique dans la ville de Hong Kong

Omniprésents, envahissants, obsolètes, uniformes… Les signes dans l’espace urbains doivent aujourd’hui être réinventés © Zélia Darnault

Les signes dans l’espace public : un malaise urbain

fonctions des signaletiques

Les signes dans l’espace urbains : une communication trop souvent à sens unique © Charlotte Eckstein

Les signes dans l’espace public sont aujourd’hui omniprésents, difficile de passer à côté. S’ils devraient être le reflet d’une communication entre cet espace et ses usagers, bien souvent la communication ne se fait que dans un sens : on nous informe, on nous sollicite (publicités), on nous oriente, et de rares fois on nous permet de nous exprimer. Si bien que depuis quelques années, certains usagers ont décidé de prendre le pouvoir sur l’espace public et de s’y imposer en apportant leurs signes personnels. On pense bien sûr au street art, aux graffiti ou plus récemment aux dear drop, ces clés USB fixées dans des murs extérieurs invitant les passants à y prendre et y déposer du contenu. Mais les problèmes actuels posés par les signes dans l’espace urbain ne sont pas que de l’ordre de la communication. Le trop plein de signes brouille le message, crée un sentiment de confusion voire d’oppression chez les usagers de la rue. À cela s’ajoutent une certaine monotonie (toutes les villes finissent par se ressembler) et un manque d’universalité. Comment donc réinvestir l’espace public en proposant des signes différents, adaptés et adaptables ?

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Dear Drop, un projet de clé USB pour des données en partage sur l’espace public © Autopilot

Révéler les talents de la ville

Charlotte Eckstein, étudiante en deuxième année de cycle master Ville Durable à L’École de design Nantes Atlantique s’est intéressée à la dimension citoyenne que peut revêtir le sujet. Pour elle, l’aspect envahissant de la publicité doit être combattu, notamment en proposant une contre-culture. Et c’est justement dans la vie locale qu’elle a trouvé son inspiration. Car nos villes regorgent de talents qui, par manque de moyens ou de réseaux, ne peuvent pas communiquer sur leurs travaux aussi facilement que les grandes marques. Comment donc permettre la valorisation de la culture locale émergente et non signalée dans l’espace public ? L’enjeu du projet est double : accompagner les artistes émergents afin qu’ils laissent leur empreinte dans l’espace public et favoriser la flânerie urbaine et donc la redécouverte de sa ville.

Avec ce projet, Charlotte entend provoquer l’émerveillement, la curiosité et éveiller l’esprit critique des passants par une campagne de communication urbaine différenciée. Suivant le principe de la chasse au trésor ludique, les usagers, à l’aide d’une application seraient baladés à travers la ville d’œuvres en œuvres (celles-ci ayant été préalablement disséminées dans l’espace public). Grâce à ce projet, Charlotte entend permettre une appropriation citoyenne de l’espace public en proposant une alternative visuelle à la toute puissante publicité.

charlotte eckstein ville

Grâce à une micro-architecture et un bracelet connecté, Siya Wang propose une signalétique embarquée et personnalisée conçue pour faciliter l’accessibilité des espaces patrimoniaux. © Siya Wang

Pour une signalétique accessible

Siya Wang, étudiante en deuxième année de cycle master Ville Durable à L’École de design Nantes Atlantique, s’est quant à elle intéressée à la signalétique dans l’espace patrimonial, et plus particulièrement à son accessibilité. L’évolution des usagers et de leurs besoins est à concilier avec la réglementation et avec la conservation du patrimoine. Pour Siya, il faut prendre la signalétique comme une façon de gérer les flux de manière logique, une opportunité de valoriser le patrimoine, et un outil efficace pour un maximum d’usagers. Comment donc concilier accessibilité et qualité patrimoniale dans les espaces publics en renouvelant la signalétique ?

Siya a choisi d’implanter son projet sur l’esplanade des machines à Nantes, haut lieu touristique de la ville où se côtoient le célèbre éléphant, le carrousel des mondes marins ainsi que des vestiges du patrimoine industriel de la ville. Siya a choisi de proposer une signalétique embarquée, ciblée pour chaque individu, qui s’adapterait aux besoins de chacun. Il s’agit de construire un dialogue entre le site et les usagers, de proposer des itinéraires personnalisés et des informations en temps réel selon les besoins et les attentes grâce à un outil interactif. Cet outil prendrait la forme d’un bracelet connecté que les usagers iraient chercher dans une micro-architecture, elle-même déjà premier lieu d’informations sur le site. Et pourquoi pas envisager que ces bracelets puissent également nous permettre de recueillir de la donnée sur les besoins et attentes des usagers ?

Espaces abritant des individus

Grâce à une micro-architecture et un bracelet connecté, Siya Wang propose une signalétique embarquée et personnalisée conçue pour faciliter l’accessibilité des espaces patrimoniaux. © Siya Wang

Par Zélia Darnault, enseignante à l’École de design Nantes Atlantique

L'École de design Nantes Atlantique
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