Habiter un lac, le Tonlé Sap

19 Juin 2014

Le cœur géographique du Cambodge est rythmé par les pulsations saisonnières du lac Tonlé Sap. Entre la saison sèche et la saison des pluies, la superficie du lac se dilate et est multipliée par six. Des variations qui sont dues aux crues généreuses du Mékong. C’est à l’intérieur de ce territoire particulier, à la fois terrestre et lacustre que nous nous sommes rendus pour y découvrir une architecture existante en harmonie avec son environnement au double jeu.

Le lac Tonlé Sap au Cambodge. Crédits : Architecture by Road

Le lac Tonlé Sap au Cambodge. Crédits : Architecture by Road

C’est de Siem Reap, après avoir gouté à la magie des temples d’Angkor, que nous partons rejoindre le Tonlé Sap où un paysage urbain particulier nous attend. Nous roulons quelques dizaines de kilomètres sur une route qui devient vite une piste de terre et de poussière. Nous sommes guidé par Borey un spécialiste cambodgien de ces villages installés sur le lac. Une belle rencontre, pour le trouver ce fut encore une course d’orientation entre les écoles d’archéologie française et australienne installées à Siem Reap. La piste que nous empruntons est construite au sommet d’une des digues qui semble dominer le paysage d’une dizaine de mètres. Nous sommes en période sèche, elle sera dans quelques mois recouverte par les eaux.

Les pistes de terre et de poussière près du Tonlé Sap. Crédits : Architecture by Road

Les pistes de terre et de poussière près du Tonlé Sap. Crédits : Architecture by Road

Sur le territoire du lac, différents villages se côtoient. Certains, ceux des vietnamiens venus tout droit du delta du Mékong, sont composés de maisons flottantes arrimées à des bouquets de pieux en bois enfoncés dans le fond du lac. Les maisons sont construites, un peu plus loin sur la rive, à sec sur de longs flotteurs en bambous. Nous traversons quelques chantiers, accompagné de Borey. Les maisons sont regroupées en petits villages et ne sont accessibles qu’en barque, chacune a la sienne. Les rues se dessinent par les vides laissés entre les maisons. Malgré le bruit des moteurs des bateaux, l’atmosphère y est paisible, l’horizon du lac à perte de vue plonge l’endroit dans une profonde sérénité.

Les maisons sont construites, hissées, et perchées sur de hauts pilotis. Crédits : Architecture by Road

Les maisons sont construites, hissées, et perchées sur de hauts pilotis. Crédits : Architecture by Road

Les autres villages, ceux des khmers sont installés au bord des points hauts du lac. Leurs maisons sont construites, hissées, et perchées sur de hauts pilotis, souvent entre six et sept mètres de haut en écho aux variations du niveau du lac. En saison des pluies, les rues, que nous découvrons sèches, deviennent canaux. A chaque saison ses réponses, l’architecture et les habitudes s’adaptent. Les changements semblent arriver et se faire en douceur, le cycle du lac a conduit à un cycle de vie dont aucun habitant ici ne voudrait se défaire. Lorsque nous arrivons au village, nous essayons de monter l’escalier qui monte au niveau de la maison. Depuis le plancher nous surmontons la rue de plusieurs mètres. Eloignés de la rue poussiéreuse, nous faisons connaissance avec une famille vivant ici. Le doyen est guérisseur, c’est lui qui nous ouvre la porte de leur maison. Ils vivent en famille dans un grand espace libre où seules les chambres sont cloisonnées. La cuisine est à l’extérieur, à l’opposé de la terrasse où nous sommes rentrés, nous y découvrons aussi tous les moyens utilisés pour l’eau potable. De grandes jarres servent à la décantation d’une eau puisée proche du lac, d’autres contiennent l’eau de pluie collectée depuis le toit.

L’eau n’est pas seule à abonder dans le généreux lac, 75% du poisson cambodgien y est péché. Ce sont donc des villages de pécheurs majoritairement mais aussi de cultivateurs. En saison sèche, certains occupent temporairement de petites maisons à l’écart du village principal, mais proches des champs fertiles que l’eau a laissés libres pour quelques mois. Ces petites maisons en bambous, construites en quelques jours, ne serviront que le temps d’une saison et de quelques récoltes. Une architecture éphémère qui se répète chaque année.

Quelques jours plus tard, nous rencontrons, Vann Molyvan à Pnomh Penh, architecte de la reconstruction du Cambodge, il est devenu Haut-Conseiller Privé de Sa Majesté le Roi du Cambodge. Il s’est inspiré de ses longues études du contexte et du territoire cambodgien pour construire ses projets à toutes les échelles. Aujourd’hui à 87 ans, il insiste aussi sur l’importance de l’eau pour les khmers et leurs cités, depuis Angkor jusqu’à nos jours.

Découvrir le Tonlé Sap en vidéo

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