« Vélo-cargo », le retour d’un héros ?

photo d un velo cargo
21 Juin 2018

En ville, les effets néfastes des véhicules polluants et individuels invitent de plus en plus à repenser les modes de déplacements urbains. Tramway, piétons, vélos et autres moyens « doux » ou plus respectueux de l’environnement reprennent leurs droits sur des espaces urbains qui étaient jusqu’alors largement dominés par l’hégémonie de la voiture personnelle.

Ce processus de réflexion sur les moyens urbains de locomotion entraîne donc les commerces de centre-ville, les lieux culturels ou même les particuliers et d’autres professionnels à trouver de nouvelles manières de se faire livrer des denrées ou des objets en tout genre jusque dans les zones les moins accessibles aux véhicules polluants ou « lourds ». Heureusement, le vélo-cargo revient à leur rescousse depuis quelques années maintenant ! Mais de quoi s’agit-il vraiment et surtout, quel est son impact sur les usages urbains ?

photo d un velo cargo

Le vélo cargo arrive en ville, pour le plaisir des petits et des grands

 

Repenser les mobilités urbaines

Les mobilités urbaines représentent un enjeu majeur des politiques urbaines publiques. Alors que l’usage de la voiture automobile a explosé au cours du vingtième siècle, les paysages ruraux et surtout urbains ont considérablement été modifiés par le tracé de voies destinées à laisser circuler le plus possible les voitures personnelles. Aux dépens très souvent des piétons ou d’autres moyens de locomotion comme le vélo.

Sauf que voilà, cette sur-utilisation des véhicules automobiles entraîne avec elle de nombreux effets néfastes, tant sur l’environnement, que sur l’usage de la ville par les citadins et les visiteurs. La pollution dégagée suite à l’utilisation des moteurs thermiques agit de manière non négligeable sur le réchauffement des villes, de leurs écosystèmes, mais aussi sur la santé des citadins et sur la préservation des ressources naturelles.

De plus, si chaque conducteur prend place dans un véhicule qui peut accueillir au minimum trois personnes, l’espace perdu en devient rapidement considérable ! Les rues sont bondées, le trafic extrêmement dense aux heures de pointe, les nuisances sonores et olfactives terribles et par conséquent, l’envie de marcher dans les rues du centre-ville part en fumée, emportée par les émanations impitoyables des gaz d’échappement.

 

photo d une rue et de voitures

Le développement des voitures au vingtième siècle ont laissé de grandes traces dans la ville, encore visibles aujourd’hui

Depuis que les villes ont compris ce qui se tramait au sein de leurs espaces publics et l’enjeu qui en découlait, elles ont petit à petit, plus ou moins fortement et rapidement, commencé à réduire l’usage de la voiture en ville. Parfois même des moteurs essence tout court. À Stockholm ou à Londres notamment, cette restriction est représentée par un péage urbain qui limite l’entrée des véhicules dans le centre, qui ne peuvent y accéder qu’à condition de pouvoir s’acquitter d’une taxe d’entrée. D’autres adoptent une stratégie différente et aménagent davantage d’espaces piétons en cœur de ville, limitant ainsi l’accès aux véhicules à certaines zones précises de la ville. C’est notamment le cas de Bruxelles qui possède le plus grand piétonnier d’Europe, ou bien de Paris qui a aménagé les berges de Seine aux dépens des automobilistes qui y circulaient quotidiennement.

Nous pouvons comprendre à travers ces processus que des conflits peuvent apparaître entre les partisans du véhicule autonome et ses détracteurs. L’exemple des berges de Paris démontre bien les clivages qui se créent. Ceux-ci invitent donc les aménageurs, mais aussi les services publics, les professionnels et tous les citoyens, à adopter un nouveau regard sur la manière de se déplacer en ville…

 

L’écologie urbaine, vecteur clé du futur

En parallèle de ces réflexions qui s’installent au sein de la population, nous constatons une place de plus en plus prépondérante pour les questions environnementales, écologiques, solidaires et sanitaires dans l’esprit de tous. La recherche quotidienne d’une ville durable de la part des acteurs de l’urbain entraîne inévitablement ces derniers à proposer des innovations et des initiatives citoyennes, La présence de la nature en ville par exemple, ou l’usage de moyens de locomotions écologiques, semblent aujourd’hui nécessaires à la préservation d’une ville saine. La santé justement, est promue par la pratique de sports urbains, d’un environnement accueillant… le tout en ville, puisque trois quarts de la population mondiale s’apprêtent à être urbains dans les prochaines années !

Et pour répondre à toutes ces demandes urbaines alliant mobilité rapide et autonome, santé publique, environnement accueillant, ville à taille et à vitesse humaines, apparaît une solution bien connue de tous les citadins : l’usage des vélos ! Aujourd’hui en effet, seule la bicyclette semble avoir la force de répondre à tout cela en même temps !

 

Les vélos-cargos à la rescousse de la ville !

Le vélo semble donc devenir le meilleur ami des citadins, mais lorsque l’on a besoin de transporter des charges, un simple vélo ne suffit plus. C’est la raison pour laquelle réapparaît aujourd’hui un phénomène qui commence à prendre de l’ampleur, celui que l’on appelle le « vélo-cargo ».

Parce qu’en effet, ce concept de véhicule utilitaire à pédales existait déjà au début du vingtième siècle, notamment à l’usage des commerçants qui devaient livrer leur morceaux de viande, leur pain, leur lait… Simple panier accroché sur le devant du guidon, plate-forme arrimée à l’arrière, ou bien vélo au design adapté au transport de marchandises, le vélo cargo peut présenter différentes allures. Sur deux (biporteur) ou sur trois (triporteur) roues, une chose est sûre : ils semblent revenir d’un pas plus vigoureux depuis les pays du Nord de l’Europe et annoncent d’apporter aux mobilités urbaines un véritable coup de pédale supplémentaire. En 2014 déjà, à Copenhague, un quart des familles avec au moins deux enfants en font l’usage !

photo d un boucher sur un velo cargo

Les vélos-cargos étaient autrefois utilisés principalement par les professionnels pour livrer leur marchandise, par exemple les bouchers

 

Rapidement effacés par l’arrivée massive la motorisation, leur utilisation est aujourd’hui revenue à la hausse de manière bien plus variée qu’à l’époque. L’apparition en parallèle de solutions d’assistance électrique au pédalage permet à un public plus large d’imaginer les différents usages possibles avec le vélo cargo : dans le cadre d’un déménagement, pour emmener les enfants à l’école ou pour transporter du matériel professionnel ou personnel, l’ampleur du potentiel qui est en jeu est facilement concevable pour les utilisateurs de la ville.

velo qui porte des cartons pour un demanagement

Les vélos-cargos peuvent même servir pour les déménagements en ville !

 

En effet, face aux restrictions progressivement mises en place par les services municipaux pour limiter la présence automobile en ville, pour garantir le transport de marchandises dans le « dernier kilomètre », le vélo-cargo semble devenir le symbole d’une adaptation à taille humaine des enjeux environnementaux, sociaux et économiques de l’urbain.

 

Les vélos cargos vont-ils réussir à se développer ?

Si le vélo-cargo revient donc sur le devant de la scène par le biais des villes nordiques comme Copenhague et qu’il apparaît comme une alternative prometteuse aux transports personnels motorisés, cette camionnette à pédales est-elle pourtant le moyen de locomotion que nous utiliserons tous dès demain ?

Le Danemark, ou bien les Pays-Bas, ont une culture cycliste très forte dans leurs villes respectives. Le relief peu marqué et les aménagements adaptés à l’usage du vélo, ainsi que la sensibilisation plus importante à l’égard des enjeux environnementaux facilitent grandement la pratique de la bicyclette auprès du grand public. Le vélo-cargo n’en est pas exclu, bien au contraire, puisqu’en plus de conserver un moyen de locomotion largement diffusé dans ces pays, il offre la possibilité de ne plus simplement se déplacer, mais surtout de transporter des objets plus ou moins lourds ou volumineux.

amenagement urbain a copenhague

A Copenhague par exemple, les aménagements pour vélos prennent une place à part entière dans le développement des villes

En France en revanche, la culture du vélo est beaucoup moins ancrée dans les us et coutumes des citadins. À l’inverse, c’est même une culture de la voiture personnelle qui s’est construite au fil des décennies depuis le milieu du vingtième siècle et qui a marqué le territoire aux dépens des cycles. La réticence encore aujourd’hui à laisser de côté les véhicules « lourds » freine davantage l’essor du vélo. En particulier, de nombreux commerçants de centres-villes estiment nécessaires de conserver des places de parking pour voitures à proximité de leur enseigne afin de faciliter la venue des clients : c’est le principe du « no parking no business ». Et puis souvent, l’utilisation de bicyclettes n’est pas non plus facilitée par les aménagements urbains. Gênés dans leur course, limités dans leurs déplacements ou soumis à des limitations de vitesses parfois aberrantes sur les pistes cyclables (comme sur la piste cyclable littorale de Cagnes-sur-Mer par exemple, où la limite est de 10 km/h), les cyclistes n’ont pas toujours la vie facile dans les villes françaises…

Pourtant, l’essor du vélo-cargo pourrait y apporter certains apaisements à des tensions éternelles. Les commerces (et tout le reste de la ville !) peuvent être atteints dans les zones à limitation de circulation, l’environnement est préservé par l’absence d’émanations nocives ou de bruits assourdissants, la santé de tous est garantie à chaque tour de pédalier, l’espace public est moins encombré par la présence de voitures imposantes… et les économies sont sauvées !

Les freins à l’expansion des vélos-cargos sont donc encore malheureusement très nombreux dans les villes françaises, malgré pourtant la connaissance des enjeux qui en découlent et malgré la force que présente ce type de véhicule. Mais cette faible emprise des cycles n’est pas uniquement de la faute de l’utilisateur. Elle est surtout liée à un manque frappant d’infrastructures adaptées, de pistes cyclables, de parkings spéciaux accessibles par les cyclistes. Avec l’aménagement de villes plus accueillantes pour les vélos, qui laissent moins de place aux voitures dans les centres-villes (si l’offre de transports en commun est en parallèle équilibrée) et qui proposent des espaces de qualité, qui donnent envie d’y pédaler, alors seulement, le vélo-cargo sera un véritable héros pour nos villes.

LDV Studio Urbain
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