L’Uriduo pour réduire les incivilités nocturnes

Quai des Antilles, le Hangar à bananes est un lieu de fête nantais. Le soir, les agressions ne sont pas rares. © Archives Ouest France
4 Oct 2022 | Lecture 2 min

Plus de  300 000 Nantais se partagent la nuit dans la 6e ville de France : en dormant, en travaillant ou en faisant la fête ! Tous les soirs, 224 000 trajets sillonnent la ville. Son fameux club électronique, le Warehouse a été classé comme étant le 2e meilleur club français, après le Rex Club à Paris. Toute cette faune nocturne, principalement composée d’étudiants, a ses propres besoins et problématiques. Depuis 2018, les incivilités nocturnes n’ont cessé d’augmenter. La faute à qui ou à quoi ? Selon Rémi Damileville, jeune designer, l’absence de sanitaires adaptés contribue à exacerber les tensions.

Quels usages pour les oiseaux de nuit nantais  ?

Des circuits bien identifiés

Selon un rapport de la préfecture de Loire-Atlantique datant de 2020, il y a eu plus de 1600 vols avec violence et 5800 agressions physiques lors des nuits nantaises cette année-là. Au vu de cette nette augmentation des crimes, 70 nouveaux policiers municipaux ont été recrutés. Des patrouilles de vigiles en civil bordent certains lieux festifs et le réseau de vidéosurveillance s’est agrandi, entre la place du Commerce et le quai des Antilles.

Le jeune étudiant à l’École de Design Nantes Atlantique a observé les trajets et comportements des fêtards nantais :

  • en début de soirée, les noctambules se concentrent dans les bars de l’hyper-centre, des bords de l’Erdre ou des bars du quai des Antilles ;
  • de minuit à 2h, un mouvement draine les usagers des bars vers les clubs du quai des Antilles, avec un pic vers 2h ;
  • de 2h à 4h, l’hypercentre se vide progressivement, car les bars ont fermé. Sur le quai des Antilles, les clubs sont en pleine effervescence.
  • de 4h à 6h, le trajet se fait en sens inverse : les noctambules rentrent des clubs et retournent en ville où ils se dispersent, sur les quais de la Fosse, à Commerce ou à Bouffay.

« Aujourd’hui je ne me sens pas en sécurité dans les rues de Nantes, probablement à cause de tous ces jeunes dehors jusque très tard, à cause du manque d’éclairage et de policiers, aussi.» – Dune, femme de 34 ans.

Peu d’urinoirs sur la route

Pour l’instant, seuls quelques dispositifs permettent aux citadins nocturnes de soulager une envie pressante : l’urittrottoir, de petits urinoirs mobiles et les cabines de toilettes fixes autonettoyées JC Decaux. Les usagers ne trouvant pas d’urinoirs à proximité se soulagent au coin d’un arbre ou entre deux voitures

© Rémi Damileville, Scenarii utilisateurs Uriduo

© Rémi Damileville, Scenarii utilisateurs Uriduo

« Les Uritrottoirs c’est sympa, mais déjà c’est souvent dans des rues glauques, et en plus c’est pas vraiment adapté aux filles. »Mélissa, 24 ans.

« Après 2h tout est fermé, quand t’as envie, t’as pas trop le choix, tu te planques entre deux voitures. » – Julie, 23 ans.

« Les cabines [JC Decaux], y en a pas assez et on les trouve pas.» – Nadia, 20 ans. 

L’Uriduo, un urinoir d’un genre nouveau

Rémi Damileville a souhaité mettre à disposition des citadins nocturnes un urinoir : l’Uriduo, adapté aux hommes et aux femmes. Il permet de gérer plus équitablement les besoins physiologiques de chacun.e.  Pour l’utiliser, nul besoin de toucher de nombreuses surfaces : les contacts manuels sont réduits au strict minimum. En effet, il est équipé de papier hygiénique et de gel hydroalcoolique pour maximiser la notion d’hygiène.

© Rémi Damileville, urinoir duo, Uriduo

© Rémi Damileville, urinoir duo, Uriduo

Des matériaux simples

« La simplicité est la complexité résolue » a dit Brancusi. Rémi Damileville confirme cette maxime en utilisant des matériaux solides et sains, tels que le PEHD recyclé et l’acier inoxydable. Des panneaux solaires permettent d’alimenter le dispositif. Moins gourmandes en énergie, ses lampes LED sont également équipées d’un détecteur automatique de mouvement. L’Uriduo est aussi facile à fabriquer qu’à utiliser. Il est autonome grâce à son réservoir ou à son raccordement au réseau des eaux usées. Enfin, il a oublié d’être polluant et statique, car il peut être déplacé là où on a besoin de lui !

© Rémi Damileville, le projet Uriduo

© Rémi Damileville, le projet Uriduo

Une identité douce et inclusive

La forme, les matériaux et le choix des couleurs ont été travaillés pour

valoriser les 3 notions chères à l’Uriduo :

  • la propreté ;
  • la douceur ;
  • la simplicité.

De plus, l’urinoir mobile et inclusif, couleur Granny Smith,  rappelle la

« ligne verte », un indicateur qui permet de ne rien manquer du parcours du Voyage à Nantes. L’idée est que l’urinoir soit visible de loin, qu’il donne envie d’y entrer et qu’il soit très propre, auréolé d’une atmosphère relaxante. Ainsi, l’environnement urbain peut mieux s’adapter à l’usage de tous les Nantais, contribuant, par la même occasion, à faire baisser le niveau d’incivilités. Hommes comme femmes peuvent y trouver refuge, se soulager et se sentir sécurisés dans ce moment de vulnérabilité.

« Dans les toilettes publiques, je recouvre la cuvette de papier toilette pour ne pas la toucher.» Astoria

« Je passe toute la cuvette au désinfectant avant de m’y asseoir. »Yann

© Rémi Damileville, Scenarii d’usages femmes, Uriduo

© Rémi Damileville, Scenarii d’usages femmes, Uriduo                     

Situé stratégiquement au coeur de la “fête”

L’Uriduo sera situé dans une zone stratégique et pourtant totalement dépourvue d’urinoirs : le Quai des Antilles.       Dans cette zone, 7800 m2 sont exclusivement dédiés aux loisirs. Parmi ses bars, restaurants et boîtes de nuit, le Warehouse, deuxième plus grand club de France, accueille jusqu’à 2500 personnes.

Situé sur le parcours des noctambules, entre la place du Commerce et le Quai des Antilles, l’urinoir public permettra :

  1. d’offrir aux utilisateurs un espace plus digne et confortable qu’un arbre ou l’arrière d’une voiture ;
  2. de canaliser les incivilités ;
  3. d’améliorer l’égalité entre les sexes et l’inclusion.

La ville de Nantes l’a démontré avec les uritrottoirs : elle est prête à investir dans des solutions d’urinoirs faciles et accessibles. De plus, le dispositif doit se fondre dans l’espace urbain et être déplaçable, car les éléments fixes obstruent l’espace public de manière permanente.

L’urinoir nocturne adapté aux hommes et aux femmes vise à faciliter la vie des citadins. Ainsi, il doit être positionné aux meilleurs endroits : ceux où il sera le plus utile et le plus utilisé. Il lui faut être visible de loin et rester accessible au plus grand nombre. Selon les évènements et les circonstances, il pourra migrer ponctuellement en fonction des évènements programmés.

Les emplacements les plus pertinents seraient :

  • à proximité du Warehouse et du Caroussel ;
  • dans le quartier de  Chantiers navals ;
  • aux alentours de la Médiathèque Jacques Demy.
 © Rémi Damileville, urinoir duo, Uriduo


© Rémi Damileville, urinoir duo, Uriduo

Pour pallier le manque de sanitaires publics à Nantes, Rémi Damileville propose des urinoirs malins, inclusifs, légers et durables. Leur concept propose une réelle plus-value, vecteur de changement positif et de sécurisation des usagers. Propre, agréable et autonome, l’Uriduo a de beaux jours – et surtout de belles nuits – devant lui…

L'École de design Nantes Atlantique
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