Les bénéfices de l’économie collaborative

La coopérative Baraka

À la base des programmes d’économie collaborative : l’entraide. Elle a inspiré la création de lieux de rencontres, comme des restaurants solidaires. Devenus tiers-lieux, ils se conjuguent, au fil du temps, avec des activités culturelles. L’économie collaborative favorise également la création entrepreneuriale et de très petites et petites entreprises peuvent trouver là leur clientèle.

L'immeuble OLD OAK

L’immeuble OLD OAK © The Collective

Avec la construction ou la réhabilitation d’immeubles dédiés à des programmes collaboratifs sont apparues des formes inédites de vie en société : le coliving, hébergement d’un nouveau type, très prisé des étudiants et des jeunes actifs, qui offre des espaces communs généreux et de nombreux services, l’espace privé restant minimal. De nouveaux acteurs se partagent des lieux parfois insolites : anciennes usines ou entrepôts désaffectés constituent en effet des volumes inespérés pour certaines activités de type concert, événementiel, coworking… De même, des parkings deviennent le terrain fertile de cultures maraîchères.
Cette récente économie, portée par le formidable essor des applications numériques et des plateformes collaboratives, a fait apparaître des professions qui favorisent les liens sociaux : « concierges » en charge d’une hôtellerie provisoire (Airbnb), community managers, gérants d’immeubles de coliving, etc., et quelques profils plus rares, comme les facilitateurs urbains – gestionnaires de l’occupation de friches de très grande échelle – ou les responsables de la reconversion et du fonctionnement de lieux délaissés et porteurs d’histoire, à l’exemple de l’hôtel Pasteur, à Rennes. Ouvert il y a cinq ans, l’occupation, subventionnée, de cet ancien palais des sciences est un succès en la matière. Il accueille gratuitement divers usagers qui s’engagent à participer activement à sa transformation.

Restauration de quartier

Dans ces deux lieux, on prend des repas en consommant des aliments bio ou en circuit court. Aux Petites Cantines, à Lyon, on participe aux tâches, aux frais, on fait des nouvelles rencontres. À la Coopérative Baraka, à Roubaix, on peut aussi suivre des ateliers, se réunir, travailler en coworking

LES PETITES CANTINES, LYON – Le sens de l’accueil

Les Petites Cantines

Les Petites Cantines © Laurence Danière / Les Petites Cantines

De plus en plus de restaurants s’inscrivent dans des circuits de production ou de préparation d’une alimentation plus saine, tout en élaborant des repas à moindre coût. Comment peuvent-ils contribuer aux liens sociaux ? C’est une mission qu’a menée avec succès l’association Les Petites Cantines en créant un restaurant participatif de quartier, d’abord à Lyon-Vaise, puis dans d’autres quartiers de Lyon, et très récemment à Lille et à Annecy.
Les filières favorisent le bio et s’appuient aussi sur des réseaux locaux et de récupération de denrées. En créant ce modèle d’organisation, le réseau Les Petites Cantines établit des liens au-delà des frontières sociales et générationnelles. Le prix des repas est libre et les convives participent à la vie du quartier. La bonne marche du système repose avant tout sur un « maître de maison » qui se charge de présenter les uns aux autres et « casse » ainsi les habitudes, en évitant la formation de groupes. À l’origine de ces lieux « positifs », des personnalités forcément très engagées : Diane Dupré la Tour et Étienne Thouvenot.

LA COOPÉRATIVE BARAKA, ROUBAIX – Fabrique de biens communs

La coopérative Baraka

La coopérative Baraka © Coopérative Baraka

Autre espace de convivialité, la Coopérative Baraka, à Roubaix, dans les Hauts-de-France, s’apparente plus à un restaurant classique. On y propose des aliments biologiques et des produits issus des filières locales. On y trouve des ateliers divers, dont un potager-école sur la terrasse, et on y loue des espaces de réunion ou de travail. Ce restaurant « tiers-lieu », qui emploie du personnel en insertion, se présente comme une « fabrique de biens communs ». Cet immeuble original en bois, conçu de façon écologique par l’architecte Matthieu Marty, a cinq ans. À l’origine de ce projet de coopérative, deux militants : Vincent Boutry et Pierre Wolf. Ce dernier, concepteur et gestionnaire de l’opération, a mené l’aventure avec un noyau dur d’une vingtaine de sociétaires.

Grands bâtis pour nouvelles activités

À Caen, dans une ancienne halle industrielle, des entreprises, des artistes et des événements vont investir les lieux à une toute autre échelle ; à Paris, un parking souterrain est devenu une ferme où l’on cultive champignons, endives et micropousses. Des expériences originales qui en inspireront d’autres.

LA CAVERNE, PARIS – Plantations en sous-sol

la caverne

La Caverne © Corinne Rozotte / Divergence

Récemment, La Caverne a rejoint les innovateurs en matière d’agriculture urbaine, que ce soit sur les toits ou dans les friches. En investissant les sous-sols, cette société, créée à l’initiative de Théo Champagnat, produit, sous des éclairages LED, de nombreuses variétés en culture biologique : champignons de Paris, pleurotes, shiitakés, endives et micropousses.
Cette ferme souterraine occupe, dans le 18e arrondissement de Paris, un parking désaffecté de plus de 8 000 m2 qui servait auparavant de territoire aux dealers locaux. Son implantation permet de livrer, à vélo et en véhicule électrique, ses productions à des commerces et des restaurants locaux, et ce, souvent le jour même de la récolte. C’est sur place, au pied des HLM et une fois par mois, que La Caverne fait le don de ses cultures aux habitants du quartier. Ce concept d’agriculture souterraine mérite un bel avenir tant la valorisation d’espaces désaffectés, le développement d’emplois agricoles en pleine ville et la qualité des produits apportent une réponse aux grands principes de l’économie circulaire.

LA GRANDE HALLE, CAEN – Un joyeux pêle-mêle

la grande halle de Caen

La grande halle de Caen © Alexandre Andurand / WIP

De la gigantesque Société métallurgique de Normandie (SMN), dont les hauts-fourneaux se sont implantés en 1917 sur le plateau de Colombelles au nord-est de l’agglomération de Caen, il ne reste qu’un vertigineux silo, ou « réfrigérant », et l’atelier électrique. Cette grande halle en béton à double nef – aujourd’hui une carcasse – va devenir un lieu de travail et de culture innovant en même temps qu’un creuset d’économie collaborative. Le projet de l’agence d’architecture Encore Heureux accueillera bientôt pêle-mêle des entreprises, des artistes, des services, des espaces de loisirs et des événements grand public. Le chantier a commencé en 2018.
Deux ans plus tôt, à proximité, le collectif ETC avait réalisé la base-vie du chantier, baptisée « Cité de chantier » – à partir de containers et de matériaux de réemploi, soit 32 menuiseries extérieures, 40 radiateurs, 20 sanitaires, 500 m² de laine de roche et 500 m de chemin de câble. La méthode de construction choisie sera reprise pour réhabiliter la grande halle. Cet édifice de 250 m² destiné aux ouvriers accueille déjà, depuis sa livraison, quelques utilisateurs de la future halle.
L’association Le WIP – pour « work in progress » – a été créée par Pauline Cescau et Ophélie Deyrolle pour imaginer et gérer le lieu dès l’automne 2019. Grâce à elle, la Cité de chantier offre aujourd’hui à dix résidents un espace de coworking et accueille régulièrement des événements culturels. Cette forme de préfiguration à échelle réduite sera prolongée jusqu’à l’ouverture de l’équipement.

Vivre avec les autres en préservant son pré carré

Pour profiter au mieux des joies du voisinage, deux solutions s’offrent à vous : avoir un petit chez-soi mais partager tout le reste, comme à l’Old Oak à Londres, ou aux Flatmates à Ivry-sur-Seine. Autre façon d’échanger : communiquer via Entre Voisins, l’appli numérique qui relie les résidents d’un même immeuble, testée à Lille et déployée en France.

L’APPLI ENTRE VOISINS, Réseau de proximité

Entre Voisins

Entre Voisins © Istock

Le concept de conciergerie tend à se développer autour de services d’intendance des espaces privés et collectifs mais pas exclusivement. Les conciergeries2.0 offrent dorénavant la possibilité d’appartenir à un réseau conçu à l’échelle locale autour de la vie d’un bâtiment et d’un quartier. Ainsi, l’application Entre Voisins permet à ses adhérents de rejoindre un groupe de personnes vivant dans la même résidence et de mieux se connaître. On peut également partager des informations d’ordre courant sur son appartement, sa résidence ou son quartier. Il s’agit bien d’un réseau social de proximité avec une messagerie privée, une page dédiée aux petites annonces, aux événements et à la gestion des espaces collectifs.
Développée par Bouygues Immobilier, cette application va être étendue partout en France sur son offre de logements.

FLATMATES, IVRY-SUR-SEINE – Coliving mode station F

Flatmates

Flatmates © Wilmotte et Associés/ Station F

À Ivry-sur-Seine, les trois tours Flatmates imaginées par l’architecte Jean-Michel Wilmotte sont construites et gérées par la Station F. Ce programme quasi hôtelier de coliving est destiné aux membres du fameux incubateur numérique et leurs salariés, et donc à de jeunes actifs. Il compte 100 appartements meublés avec six chambres individuelles, trois salles de bains et un salon-cuisine à partager. Dans leur forfait mensuel de 400 euros tout compris, les 600 résidents bénéficient de services : fitness, spa, café-épicerie, ménage, événements le soir… Afin de créer un climat plus convivial, la répartition des nouveaux arrivants s’opère à l’aide d’un algorithme mis au point par la start-up Whoomies. Objectif : tenir compte aussi des compatibilités de caractères, des affinités dans les habitudes alimentaires, etc.

L’IMMEUBLE OLD OAK, LONDRES – Coliving mode outre-Manche

L'immeuble OLD OAK

L’immeuble OLD OAK © The Collective

Il est de plus en plus difficile de se loger dans les grandes villes : les prix sont souvent inabordables, les conditions difficiles et la crise du logement pousse parfois étudiants ou jeunes actifs à des compromis. À Londres, le projet Old Oak, lancé par The Collective, existe depuis mai 2016. Il propose une alternative aux espaces individuels étriqués des résidences étudiantes classiques.
Cet établissement d’un genre nouveau ressemble plus à un hôtel qu’à une auberge de jeunesse : les espaces collectifs sont surdimensionnés et diversifiés mais les chambres restent standards. On en compte 545, dont une majorité de studettes de 8,50 m². Chaque résident dispose a minima d’une chambre avec douche, lavabo et WC et de l’accès aux services collectifs, notamment deux restaurants. L’établissement possède une « conciergerie », des salles de gym, un spa, des espaces de coworking où l’on peut profiter d’événements, un home cinéma, une bibliothèque… Autre avantage de la formule, la simplicité de gestion : un paiement unique donne accès à tout l’éventail proposé. Les tarifs de location les plus bas sont de 277 euros par semaine pour un engagement d’un an et de 316 euros par semaine pour quatre mois.
De nombreuses colocations à Londres coûtant l’équivalent ou plus, il est facile de comprendre pourquoi beaucoup d’étudiants choisissent l’Old Oak dont le taux d’occupation est de 97 % depuis son ouverture.

Eléments initialement présentés dans l’exposition « Décloisonnons la ville ! » à la Cité de l’architecture & du patrimoine, du 30 janvier au 11 mars 2019. Plus d’informations dans le catalogue de l’exposition.

Demain la ville le lab
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