Stationnement, champ de bataille : quelle place pour l’auto-immobile ?

19 Sep 2013

Deux récentes actualités londoniennes sont venues remettre sur le devant de la scène un sujet qui n’en avait pas vraiment besoin. Début août, une place de parking à ciel ouvert a été mise en vente pour la bagatelle de 350 000 euros, soit plus de 1 500 euros le m² de stationnement. Plus anecdotique mais pas moins porteur de sens : début septembre, on apprenait qu’un gratte-ciel de la capitale faisait fondre la taule des voitures trop longtemps garées à ses pieds…

Parking Day © 18 Brumaire / Flickr

Ces deux exemples témoignent, chacun à leur manière, des tourments dans lequel est aujourd’hui plongée l’automobile en ville. Le stationnement y apparaît à la fois comme le symptôme des maux de la voiture, mais peut-être aussi la solution d’une ville mobile qui reste à construire. Cela ne se fera toutefois pas sans soulever de houleux débats…

Fin de règne

Si le premier exemple londonien résume à lui seul le manque d’espace auquel sont aujourd’hui confrontés les mobilités urbaines, et l’automobile individuelle en particulier, le deuxième symbolise de son côté ce que certains ont baptisé “auto immobile”. La formule a le mérite de la clarté. Utilisée par les “anti-bagnoles”, elle vient synthétiser les paradoxes de la vitesse automobile, plus lente que les autres modes dès lors qu’on lui ajoute le nécessaire temps de recherche de place disponible. Un temps qu’on oublie trop souvent de compter lorsque l’on sanctifie la fameuse “liberté automobile”, mythe aussi vieux que la voiture elle-même.

De même, le cabinet de sociologie Chronos rappelle régulièrement, avec cette même formule, qu’une voiture individuelle n’est utilisée qu’à 5% de son temps. Chaque voiture stationnée occupant plus de vingt mètre-carrés d’espace public, impossible de ne pas s’interroger sur la place que mérite d’occuper la voiture dans nos villes.

Du parking au parklet

La question agite depuis quelques années maintenant les anti-voitures les plus farouches, mais aussi les citadins moins extrémistes, qui se rejoignent autour d’une tendance urbaine iconoclaste : le “parklet”, ou comment réinvestir astucieusement l’espace hier alloué aux voitures immobiles, grâce à des modules agiles permettant de transformer tel lot en café pour l’été, tel autre en galerie d’art éphémère

Le phénomène a pris son essor aux Etats-Unis, avant de se diffuser à travers de nombreuses villes occidentales et parfois même un peu plus loin. On connaît ainsi l’emblématique Parking Day, journée officielle de cette réappropriation des espaces de stationnement, et dont la version française aura lieu le 20 septembre prochain.

L’idée fait de nombreux émules et déborde même des seules places de stationnement pour envahir les rues ; exemple en Belgique, où les Bruxellois se mettent à pique-niquer dans la rue pour militer contre le tout-automobile.

Partage du butin

Parking Day 2008 © sv johnson / Flickr

Ces exemples partagent une même ADN : le cri de guerre revanchard pour qui souhaite récupérer un territoire trop longtemps occupé. En ce sens, les affres du stationnement – et les parklets comme moyen d’y remédier – font écho à des problématiques urbaines plus larges. On retrouve ainsi, jusque dans la sémantique, ce que l’architecte-urbaniste Nicolas Soulier a étudié dans son brillant ouvrage Reconquérir les rues. Il y propose ainsi des pistes d’actions pour (entre autres) “rééquilibrer le partage modal de la rue”, c’est-à-dire “diminuer la place de la voiture au profit d’une pluralité de modes de transports” (Métropolitiques – Contre la stérilisation des espaces publics)

Tout l’enjeu du stationnement tient dans ces lignes. Les mobilités explosent : de nouveaux modes ne cessent de s’inventer (les vélos et voitures en libre-service n’en sont que les derniers avatars), qui tous réclament une ressource en raréfaction : de l’espace. Sans une véritable réflexion sur les substitutions au stationnement, impossible de construire une ville véritablement durable dans laquelle ces modes doux pourront s’épanouir. Cela risque de faire quelques mécontents… Mais a-t-on vraiment le choix ?

{pop-up} urbain
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Vos réactions

Il faut effectivement penser aux mécontents sans pour autant abandonner l’idée de faire de la place aux modes doux. Penser à eux, c’est surtout les amener à comprendre que la société change par manque de place, de moyens financiers et pour toutes les raisons écologiques qui s’imposent.

Pour ce faire, penser aux mécontents signifie d’éviter à tout prix les provocations du type de celle réalisée par les bruxellois. Parce que ça agace ! Et parce que nous cherchons à expliquer qu’il est important de mieux vivre ensemble, il est tout aussi important de ne pas se monter les uns contre les autres. Cherchons à comprendre pourquoi un automobiliste préfère le confort de sa voiture et mettre autant de temps qu’en transport tout en payant beaucoup plus cher et identifions les meilleures solutions en l’encourageant à faire quelques concessions…

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