L’ESS : pour une construction des villes plus inclusive et plus humaine

© Hanna Busing sur unspash
25 Jan 2023 | Lecture 3 minutes

L’année 2022 a permis, une nouvelle fois, à la mairie de Paris, de récompenser les coopératives, associations, SAS, structures engagées dans la valorisation des circuits courts, l’émergence de liens sociaux ou encore le développement de l’agriculture urbaine. Les Trophées de l’Economie Sociale et Solidaire mettent en lumière et soutiennent des initiatives locales, inclusives et responsables et sont une bonne occasion d’analyser l’impact qu’elles ont sur la ville.

L’Économie Solidaire et Sociale (ESS), un modèle plus social et humain ?

À l’heure où les citadins sont de plus en plus nombreux et où les enjeux de sociétés se complexifient, l’économie doit être repensée afin d’évoluer avec les villes et les rendre plus solidaires et inclusives. Se loger, consommer, travailler, sont autant de thématiques que l’Économie Solidaire et Sociale (ESS) investit pour imaginer une nouvelle façon de faire fonctionner la ville.

Mais de quoi parle-t-on lorsqu’on évoque l’ESS ? Pour rappeler quelques chiffres, l’Économie Solidaire et Sociale représente environ 10% du PIB et 14% des emplois privés en France. Ce sont près de 222 000 entreprises et structures qui font travailler 2,38 millions de salariés. Cette économie a pris forme dans les années 70, et vise à répondre aux nouveaux besoins de la population, créés notamment par un chômage grimpant et une forte exclusion sociale.

Dynamiques de réinsertion, créations d’emplois dans une dynamique d’utilité sociale, coopération et d’ancrage local adapté à chaque territoire sont autant d’objectifs que l’ESS cherche à atteindre. Et peu à peu, son inscription et sa pérennisation dans notre société viennent modifier nos modes de travail, de consommation et d’interactions sociales. Car l’ESS investit des thématiques qui deviennent de plus en plus structurantes notamment en ville : circuit court, recyclage, commerce équitable, agriculture urbaine… Et cela impacte directement l’environnement urbain car les thématiques investies transforment peu à peu les paysages des villes en les mettant au service de l’initiative sociale. De nouvelles formes urbaines se démocratisent depuis plusieurs années. Des tiers-lieu, festivals, espaces de coworking, jardins participatifs apparaissent et viennent rythmer les temps sociaux urbains en ville et animent la vie de quartier. Plus que jamais au cœur des villes, l’Economie Sociale et Solidaire (ESS) doit être développée et démocratisée. Il paraît même important de la récompenser. C’est pourquoi la ville de Paris a mis en place les trophées de l’ESS.

Promouvoir l’ESS en créant des Trophées 

Lancée depuis 2009, les trophées de l’Economie Solidaire et Sociale est une initiative mise en place par la ville de Paris. Grâce à ces Trophées, plus ou moins 670 porteurs de projets se sont fait connaître par cette initiative et 147 d’entre eux ont vu leur structure, tout secteur confondu, être soutenue. Insertion, lien social, lutte contre l’exclusion, préservation de l’environnement, économie circulaire et consommation responsable… Autant de sujets investis par les candidats qui prouvent bel et bien que le modèle de l’Économie Solidaire et Sociale (ESS) est plus que jamais structurant dans le développement des territoires. Pas étonnant que la ville de Paris souhaite soutenir ces innovations qui impacteront demain non seulement les modes de vie urbains, mais qui participeront également à sa transition.. En finançant les lauréats de ces trophées, la ville leur permet non seulement de développer leur activité mais également de se pérenniser au sein d’un écosystème de plus en plus grandissant

https://twitter.com/ESS_France/status/1597896666673451009?s=20&t=y0mpR203V3UFMi5FX5_lnA

Qui sont les lauréats de 2022 ?

Les trophées de l’ESS sont donc l’occasion de s’intéresser aux thématiques émergentes qui investiront prochainement les villes. Cette année, les 12 lauréats qui ont été choisis  mettent en avant le recyclage et l’économie circulaire avec le “Label Emmaüs” ; l’agriculture urbaine avec “Le Paysan Urbain” et “Re-belle” ; les pratiques sportives avec “Football Écologie France” ;  ou encore l’insertion sociale, professionnelle avec “Travail et Vie”, “Ecodair” par exemple. Ces structures ont été retenues parce qu’elles ont été identifiées comme pertinentes dans la construction et l’évolution de la ville. En valorisant les ressources locales, l’action de ces structures répond au mieux aux besoins des territoires et de ses habitants notamment grâce à l’amélioration de leur cadre de vie, notamment en facilitant l’accès à des produits, des activités et des espaces de proximité. C’est le cas de “La Recyclerie Sportive” qui va développer un réseau de points de collecte au sein d’équipements sportifs, afin de récupérer des articles, les trier, tester et réparer avant de les redistribuer dans des boutiques solidaires en Île-de-France. Avec des coûts réduits, les plus précaires peuvent alors bénéficier d’équipements sportifs de qualité. Et derrière le développement de nouvelles activités et d’espaces, c’est tout un réseau de création d’emplois, qui se met en place. C’est d’ailleurs l’un des objectifs de l’association “Travail et Vie”, une structure d’insertion par l’activité économique (SIAE) qui exerce dans la blanchisserie, le maraîchage, l’entretien des espaces verts et le bâtiment. Elle veut développer le réemploi par la formation, l’insertion, en créant des ateliers de transformation des matériaux, le recyclage dans le curage du second œuvre dans le bâtiment et la création d’une plateforme de tri et de redistribution des matériaux.

Les propositions des lauréats viennent également directement modifier les cadres de vie  : renaturation, agriculture urbaine… Et participent activement à créer des villes plus durables. “Le Paysan Urbain” est un bel exemple dans sa capacité à faire évoluer les paysages urbains tout en favorisant l’insertion sociale : en développant un modèle d’agriculture durable, économiquement viable et respectueux de l’environnement, elle permet également de recruter de nouveaux salariés en insertion. 

Ces douze lauréats sont donc le symbole de la puissance de l’ESS à investir des thématiques urbaines. Depuis plusieurs décennies, la structuration de l’ESS n’est plus à prouver. Mais au-delà de son impact sur la ville, qu’avons nous à apprendre de l’économie sociale et solidaire pour transformer les pratiques professionnelles de la fabrique urbaine ? De nouvelles méthodes s’offrent à nous afin de créer un système fiable, inclusif, égalitaire et surtout conscient de nos problématiques actuelles. Les acteurs de la fabrique urbaine peuvent et doivent s’intégrer à cet écosystème d’innovation sociale et solidaire, pour offrir un meilleur cadre de vie aux citadins et pour favoriser l’équité et l’attractivité des territoires, en préconisant un développement urbain durable et responsable. Dans la continuité de ces trophées de l’ESS, la fabrique urbaine doit davantage sensibiliser à cette économie et à son intégration dans les projets urbains en favorisant une meilleure connaissance de ses acteurs et en contribuant à la structuration de filières et de nouveaux domaines d’activités. Mais plus largement, en associant les acteurs de l’ESS et l’innovation sociale avec les habitants dans la réflexion et la gestion des futurs projets, de nouvelles formes de gouvernance et de coordination des territoires sont à imaginer. Car derrière des modes de faire qui sont différents, il se trouve que les ambitions sont communes : celle de créer des villes plus humaines, plus inclusives et durables.

 

LDV Studio Urbain
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