Comment préparer nos écoles aux vagues de chaleur de plus en plus fréquentes ?
Après avoir connu un épisode de canicule intense durant l’été 2025, plus de 2 200 écoles publiques ont été fermées le mardi 1er juillet dernier, privant de cours des milliers d’écoliers. Cet événement met de nouveau en lumière la vulnérabilité de nos établissements scolaires face aux effets du réchauffement climatique. A la suite du nombre de fermetures inédites atteint cet été, et face à la menace de chaleurs plus importantes à venir, les syndicats de l’Éducation nationale et plusieurs associations écologistes ont appelé à “lancer une véritable rénovation écologique du bâti scolaire public”.
Pourquoi est-il important de préparer les écoles aux canicules ?
Les effets du réchauffement climatique vont en effet tendre à devenir de plus en plus importants dans les prochaines années ou les prochaines décennies, et il semble donc nécessaire de s’y préparer dès maintenant.
Dans le cas des écoles, cela est particulièrement vrai. Selon Oxfam, 1,3 million d’enfants fréquentant les écoles maternelles pourraient être exposés en classe à une chaleur excédant les 35°C d’ici à 2030 – près d’une classe sur deux en France. Or les enfants sont particulièrement vulnérables à la chaleur : leurs organismes régulent moins bien la température que celui des adultes, et ils ont moins de capacité à percevoir la déshydratation, ce qui augmente le risque de malaises.
En plus de cela, la chaleur a un impact direct sur les capacités d’apprentissage. Les travaux pionniers du chercheur suédois David Wyon et du danois Pawel Wargocki, ont montré que les performances de calcul et de lecture d’élèves de 9 à 12 ans étaient nettement plus faibles dans des salles entre 27°C et 30° C qu’à 20° C. Ils affirment également que baisser la température intérieure améliore la vitesse d’exécution des tâches et réduit les erreurs. Des chiffres plus récents indiquent que diminuer la chaleur d’uniquement 1° C améliore de 2,3% les performances des élèves.
Lutter contre la surchauffe via l’adaptation du bâti scolaire revient donc à investir dans un cadre d’éducation plus sain et plus protecteur pour les enfants, tout en améliorant l’efficacité de l’apprentissage.
Quelles solutions pour des écoles plus fraîches ?
De nombreuses réponses aux problématiques de chaleurs ont été imaginées et commencent à se mettre en place. L’une des méthodes principales pour lutter contre les températures élevées consiste à réaménager les cours de récréations. Les cours entièrement bétonnées ne sont pas très efficaces, puisqu’elles absorbent la chaleur, la conservent et la restituent, et ce même la nuit, ce qui empêche les écoles de se rafraîchir.
C’est pour lutter contre ce phénomène que certaines écoles ont décidé d’adopter le principe des cours “Oasis”. L’idée est simple : désimperméabiliser les sols, planter des arbres et de la végétation, installer des points d’eau potable ou encore créer davantage d’ombre dans ces espaces afin que les enfants puissent profiter de l’extérieur même en cas de chaleur intense. Ces cours, en devenant des îlots de fraîcheur, permettent également aux bâtiments de l’école ou à proximité de celle-ci, d’être rafraichi en cas de température intense. C’est aussi l’occasion pour les écoles de créer des espaces de détente et de jeux plus inclusifs, en y intégrant d’autres utilisations que le terrain de football classique.
L’école élémentaire Emeriau, dans le 15ème arrondissement de Paris, a procédé en 2022 à une véritable transformation de sa cour de récréation, accompagnée par le Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE) de Paris.
En partant des différents besoins existants : celui d’un espace de calme et d’un espace plus sportif, le projet visait à diversifier l’offre d’activité en proposant de nouveaux équipements ludiques aux élèves.
Plus de 200m² ont été désimperméabilisés, deux fontaines d’eau potable ont été installées et une trentaine de mètres carrés ont été plantés. La cour dispose maintenant d’un mur d’escalade couvert, de parcours sportifs mais aussi d’assises ou d’une cabane ludique en bois.

Une cour d’école végétalisée. – Sebelas Studio via Vecteezy
Mais transformer les cours n’est pas la seule action qu’il est possible de mettre en place pour lutter contre la chaleur. À Marseille, la réponse prend la forme d’un chantier hors norme : un Plan écoles à 1,5 milliard d’euros, lancé en 2021. L’objectif est ambitieux : rénover les 477 écoles de Marseille. Là où les différentes initiatives comme les cours Oasis sont souvent vertueuses, mais à petite échelle, l’importance du Plan écoles marseillais réside dans l’adaptation d’un territoire à grande échelle.
Si la végétalisation des cours est un des points du programme, d’autres enjeux bâtimentaires sont également au centre de ce plan. L’importance est mise sur la construction écoresponsable des futurs écoles et la rénovation thermique des bâtiments réhabilités.
27 écoles ont déjà été livrées depuis le début du plan, alors que d’autres projets sont déjà en phase d’étude. On peut citer en exemple le groupe Scolaire Emile Vayssière, où deux bâtiments ont été réhabilités selon un procédé de construction bioclimatique, en utilisant des matériaux biosourcés en ou en réemployant des matériaux. L’objectif est d’offrir un meilleur confort climatique, tout en limitant l’impact carbone de l’école, grâce à l’installation de panneaux photovoltaïques et en chauffant/refroidissant l’école via la géothermie.

Une école rénovée et végétalisée. – Ryan Jacobson via Unsplash
Avec une meilleure isolation, une ventilation naturelle, une protection solaire plus importante. Ces nouveaux bâtiments devraient permettre à l’école d’être plus résiliente face au réchauffement climatique.
D’autres enjeux sont également abordés à Marseille, comme l’ouverture sur le quartier par exemple. Cela se traduit par l’ouverture de nombreux aménagements au public, comme le gymnase ou l’espace média. Ainsi les écoles deviennent des lieux d’échanges, de partage et de vie dans le quartier, et peuvent même en cas de canicule, devenir des refuges pour les personnes habitants dans des passoires thermiques.
La rénovation : une opportunité ?
La rénovation des écoles peut enfin être vue comme une réelle opportunité à saisir pour les collectivités, à la fois en donnant la possibilité aux élèves et aux personnels qui utilisent les bâtiments scolaires (professeurs, équipes administratives…) de co-construire des espaces qui répondent plus efficacement à leurs besoins. La rénovation permet aussi de former les élèves et leurs professeurs aux enjeux écologiques et de parler plus largement de la transition écologique nécessaire à tous les usagers des écoles (élèves, parents, professeurs…).
Rénover toutes les écoles à certes un coût, qui peut être important, mais au vu des enjeux actuels, il semble pourtant nécessaire d’investir dans ces lieux qui forment la jeunesse, et façonnent donc l’avenir. De multiples solutions existent : du petit geste à adopter au quotidien pour rafraîchir les espaces aux grands chantiers de rénovation ou de construction des bâtiments qui tiennent compte du réchauffement climatique. Mais la canicule n’est pas le seul impact du bouleversement climatique que les écoles vont devoir prendre en compte : les inondations, vagues de froid plus importantes l’hiver vont également être à anticiper dans la rénovation de nos écoles, afin d’assurer à chacun un cadre d’apprentissage sain et efficient. Les écoles, en s’adaptant, vont également pouvoir venir compléter ou renforcer les stratégies à plus grande échelle de lutte contre les effets du réchauffement climatique, en devenant par exemple de véritables îlots de fraîcheur en ville.